Camp de réfugiés : mon éxpérience
L'arrivée en Serbie :
Récemment, un ami a posté sur Facebook un appel pour béné- voles de l’association suisse Borderfree. Intrigué, il m’a fallu peu de temps pour le contacter et lui demander de me relater son expérience. Sitôt convaincu, j’ai vite réservé les billets d’avion et je me retrouve quelques jours plus tard en Serbie, près de la frontière du Kosovo et de la Macédoine.
Daniel Salamanca
Mon premier jour au camp
Encore à moitié endormi, j’ai droit à un tour du camp, organisé par la coordinatrice. Le camp est fermé pour ses résidents : il leur faut une autorisation de sortie, d’une durée maximale de trois heures. Beaucoup d’organisations sur place s’occupent principale- ment des enfants ; Borderfree, en revanche, propose aux adultes des cours d’anglais et d’allemand, une clinique dentaire mobile, une cafétéria et un salon de coiffure, tout cela bien évidemment gratuitement.
Heureusement, on m’épargne d’avoir à enseigner dès le premier jour. Je peux gentiment apprendre à connaître les réfugiés venant à l’école. Ces derniers sont d’une gentillesse infinie. Ils sont très reconnaissants de notre travail et apprécient notre présence sur le terrain. Après les cours obligatoires, les plus persévérants peuvent participer à des ateliers, comme par exemple la publication du journal du camp, de A à Z. La journée finit par une heure de fitness organisée par un réfugié sportif et dévoué. Dans les diverses activités, les hommes sont en général séparés des femmes. La mixité n’est pas encore tolérée par tous les résidents. Les bénévoles doivent quitter le camp à 18 h car on nous déconseille d’y rester la nuit tombée.
Les jours suivants
Les jours suivants s’enchaînent et défilent en un rien de temps. J’essaye de m’intégrer à l’équipe et suis ravi de voir des bénévoles engagés presque 24 heures sur 24.
On travaille même le samedi. Ce jour-là étant calme, j’ai l’occasion entre autres de faire un match de foot et aussi d’avoir des discussions un peu plus en profondeur avec certains résidents. Ils me parlent de leur pays d’origine et de leur aventure jusqu’en Serbie.
La période d’euphorie du début s’estompe peu à peu et laisse place à des sujets plus lourds. Un grand nombre de personnes ont fui des conflits. Tous ont eu un périple long et difficile, nécessitant l’aide onéreuse de passeurs.
Cependant, certains d’entre eux viennent aussi pour le travail et les salaires plus élevés qu’offre l’Europe. Ils ne souhaitent donc pas rester en Serbie et veulent rejoindre des pays comme l’Autriche ou l’Allemagne.
Un jeune me parle de son ambition de devenir millionnaire... Il me raconte aussi l’accueil qui lui sera réservé en Allemagne. Il ira dès son arrivée au poste de police. Ensuite, il sera envoyé dans un camp. Un mois après, selon lui, il recevra un appartement et une aide de 400 euros par mois.
Je reste perplexe par rapport à ses attentes. Cela me laisse songeur : d’où est venue son idée que l’Europe est devenue aujourd’hui le nouvel Eldorado ?
Ma remise en question
Néanmoins, beaucoup de réfugiés ont selon moi des raisons légitimes de fuir. Mais qui suis-je pour juger de la justesse de leurs décisions ?
Cela m’a aussi énormément touché de voir la détresse psychologique à laquelle les réfugiés doivent faire face quotidiennement. Ils sont pour la plupart seuls, loin de leur famille qui place sur eux des attentes énormes. La difficulté de la situation est accentuée par la diversité des cultures confinées dans des espaces étroits. Des conflits émergent parfois la nuit entre les différentes nationalités. Tout cela ne fait qu’augmenter leur sentiment de désespoir et leur envie de quitter le camp pour un futur meilleur.
Cependant, j’ai de la peine à envisager à quoi ressemblera leur futur. Lorsque j’essaye de me mettre à leur place, je suis paralysé par le degré d’incertitude concernant leur avenir. Quel sera leur pays d’accueil ? Vont-ils devoir retourner chez eux ? De quoi vont-ils vivre ?
Ma tentative d’empathie montre ses limites. D’une part, une partie des résidents ont des comporte- ments qui me dépassent. Je me dis qu’à leur place, je passerais mes journées à apprendre de nouvelles compétences au lieu de tuer le temps. Cependant, d’autre part, la connexion est instantanée avec d’autres réfugiés ; surtout chez les jeunes : je vois dans leurs yeux le même regard que mes amis d'enfance, les mêmes valeurs que mes concitoyens, le même humour que mes potes suisses, peu de différences après tout. C’est dans ces moments-là que l’injustice de notre monde est la plus flagrante
Que faire à l’avenir?
Pour ces raisons-là et pour conclure, mon expérience en tant que bénévole s’est révélée très enrichissante. Néanmoins, je reste quelque peu sur ma faim. Comment aider ceux qui le « méritent » ? Comment réagir face à leur détresse ? Des mots de tendresse et d’encouragement sont réconfortants mais suffisent-ils ?
Si ces questions vous turlupinent aussi, je vous invite à vous engager, en prenant sur votre temps ou par le biais d’un soutien financier, à lutter contre les inégalités de ce monde avec des associations comme Être Partenaires ou encore Borderfree https://border-free.ch/de.
Un jour peut-être, vous serez le prochain relayeur d’espoir ?
En dehors de ses activités habituelles, (voir Présence N° 1 de février 2018), Être Partenaires soutient notamment quatre projets d’accueil sur territoire suisse (au Tessin, en Suisse romande et en Suisse allemande).
https://www.etre-partenaires.ch